Violence

Violence conjugale en 2022 : enjeux et avancements

Un tribunal spécialisé

Un changement percutant apporté par le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, du gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ), a été le projet de loi no 92. Cette nouveauté prend le nom de la Loi visant la création d’un tribunal spécialisé en matière de violences sexuelles et de violence conjugale et portant sur la formation des juges en ces matières.[2] Présentée au mois de septembre dernier, l’initiative a été accueillie chaleureusement par tous les membres de l’opposition. C’est d’ailleurs à l’unanimité que le projet de loi avait été adopté en novembre dernier.[3] Québec se taille une place en tant que pionnier pour ce changement novateur en étant le premier système juridique à introduire ce type de juridiction.[4] La prochaine étape du tribunal, en 2022,sera de mettre en œuvre le prototype dans cinq districts judiciaires.

C’est dans l’optique de rebâtir la confiance avec les victimes et d’offrir le processus le plus adéquat que le gouvernement a décidé d’instaurer cette initiative. C’est aussi en écoutant les recommandations présentées par le comité d’experts sur l’accompagnement des victimes d’agressions sexuelles et de violence conjugale dans le rapport Rebâtir la confiance[5] que cela s’inscrit. En commissions parlementaires, le projet de loi initial a subi quelques modifications. S’assurer de préparer adéquatement l’ensemble des intervenants qui œuvrent auprès des victimes sera une prémisse du projet de loi. C’est d’ailleurs ce qu’a avancé la députée libérale de Verdun et porte-parole de l’opposition officielle en matière de condition féminine, Isabelle Melançon :

« Le projet de loi va donc favoriser — et ça, ce n’était pas dans le projet de loi initial — la formation de tous les intervenants du processus judiciaire. On a même modifié le titre, justement, pour éviter de ne mettre que les juges sur la touche de la formation. Ce n’est pas un projet de loi qui s’adresse aux juges, c’est un projet de loi qui s’adresse à tous ceux et à toutes celles qui vont accompagner les victimes dans le processus. »[6]

Il faut aussi soulever la dissidence de la juge en chef de la Cour du Québec, Lucie Rondeau, quant à l’instauration du tribunal. Le mémoire présenté par la Cour à ce sujet voit la mise en place de cette solution comme inopportune, car cela ne serait pas associé à la mission d’un tribunal.[7] Il y a une grande diversité d’infractions traitant de violence conjugale et d’agressions sexuelles sans que ces deux concepts soient explicitement mentionnés dans des articles du Code criminel.[8]Le rapport évoque également la crainte d’une certaine partialité prise par cette nouvelle organisation. Malgré ces réticences, le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, ira de l’avant avec les projets pilotes dans les différents districts judiciaires, car ceux-ci auraient préséance à cette étape de l’instauration de la nouvelle juridiction.[9] La Cour du Québec avait d’ailleurs créé une division visant à traiter d’enjeux similaires portant le nom de « Accusation dans un contexte de violence conjugale et sexuelle » (ACCES). L’avenir de cette création demeure incertain si le projet du tribunal spécialisé va de l’avant de manière permanente.[10]

Du sur place en protection de la jeunesse

L’idée d’un tribunal spécialisé avait été mise sur la table dans le rapport Rebâtir la confiance[11]parmi les 190 recommandations. À travers cette liste étoffée de diverses solutions à mettre en place, certaines autres mesures ont été instaurées. C’est notamment le cas avec les consultations juridiques gratuites grâce à la plateforme Rebâtir[12]qui prévoit un accompagnement pour les victimes sur diverses questions regroupant les agressions sexuelles et la violence conjugale.Par contre, en matière de protection de la jeunesse, les changements se font toujours attendre. Présenté en décembre 2021, le projet de loi no 15 apportant la Loi modifiant la loi sur la protection de la jeunesse et d’autres dispositions législatives[13]fait abstraction de la violence conjugale.[14]

Le Directeur de la protection de la jeunesse (DPJ) ne reconnaît pas encore assez la violence conjugale. Une réelle disparité s’immisce donc entre les textes de loi en matière d’agression sexuelle et de protection de la jeunesse. Le nouveau projet de loi ne fait aucune mention de cette réalité alors que l’heure est à la vigilance et la sécurité. Le rapport Rebâtir la confiance faisait d’ailleurs explicitement mention de cette problématique à sa recommandation 132 : « Modifier l’article 38 de la Loi sur la protection de la jeunesse pour créer une catégorie distincte de mauvais traitement quand les enfants sont victimes ou exposés à la violence conjugale. ».[15]

Feu vert pour les bracelets anti-rapprochement

Le bracelet anti-rapprochement permet à la victime, grâce à un dispositif de géolocalisation, d’être notifiée lorsque la personne qui le porte s’approche à un certain périmètre.[16] La possibilité d’instaurer ce prototype avait été soulevée et c’est le 1er décembre 2021 que la ministre de la Sécurité publique caquiste Geneviève Guilbault a donné le feu vert à leur mise en place.[17]Cette initiative s’était d’ailleurs taillée une place dans le rapport Rebâtir la confiance afin de maximiser la protection des possibles victimes.[18]

Le bracelet sera porté sur ordonnance soit pour les personnes ayant été reconnues coupables d’agression sexuelle ou cellesen attente d’un verdict.[19] La ministre a mis l’accent sur l’importance du consentement. Les bracelets ne seront donc jamais portés par les victimes, mais bien par les délinquants tout en ayant le consentement de la victime. Cette mesure visera à augmenter leur sentimentde sécurité et à éviter les situations conflictuelles et dangereuses.

Un second article sur le sujet sortira dans les prochaines semaines afin de décortiquer les enjeux et les problématiques futurs concernant la violence conjugale au Québec.

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